Le premier pape "global" de l'histoire. Editorial de Marco Impagliazzo
PAPE

Le premier pape "global" de l'histoire. Editorial de Marco Impagliazzo

pour La Nuova Sardegna

Le pape qui venait presque « du bout du monde » s'est éteint le lundi de Pâques, au cœur de la fête de Pâques, qui célèbre la résurrection de Jésus. Comme les nombreuses surprises de son pontificat, sa disparition a, d'une certaine manière, constitué une surprise.

Sa mort est survenue après qu'il eut pris congé des fidèles et du monde : dimanche, il avait encore donné la bénédiction « Urbi et orbi » depuis la loggia centrale de la basilique Saint-Pierre et s'était longuement promené sur la papamobile, parmi les fidèles. Il semblait être un pape en convalescence, après les longues journées passées à l'hôpital, mais il s'agissait plutôt d'un adieu. Il l'avait lui-même compris.

Douze années se sont écoulées depuis son élection, qui avait marqué un tournant dans une Église alors dévastée par le traumatisme de la démission de Benoît XVI, motivée par un sens des responsabilités plutôt que par des questions de santé. En 1978, il y avait eu le tournant de l'élection d'un pape « étranger », provenant du monde communiste, mais toujours européen. Européen comme le fut son successeur, Joseph Ratzinger. Avec Bergoglio, il y a un saut dans la papauté : géographique mais pas seulement. À commencer par le choix du nom de François : le premier pape à s'appeler ainsi, poussé par le désir d'une Église pauvre, Église des pauvres.

En tant que cardinal, il avait été le protagoniste du document d'Aparecida, émis par la conférence épiscopale du continent latino-américain, qui a donné de nouvelles lignes directrices à la présence de l'Église sur ce continent.

Au cours de ces années, avec une simplicité dépouillée, François s'est présenté comme prêtre et évêque. Ce qui a le plus frappé les fidèles, c'est le ton évangélique de ses discours : ceux qui l'écoutaient percevaient un Évangile vivant, plutôt qu'une théologie, une idéologie ou une vision du monde. Cela suscitait des sympathies et des répulsions.

L'insistance sur les pauvres a été constante : l'Église des pauvres de Vatican II, vécu dans la relation avec les blessés de la vie, mais aussi par une articulation entre la mystique du pauvre (évangélique) et l'engagement. Les migrants et les réfugiés ont été l'une des références les plus fréquentes : dès son premier voyage hors du Vatican, sur l'île de Lampedusa, avec un message fort sur la nécessité de l'accueil. Un thème gênant pour les franges catholiques identitaires.

Bergoglio, sur le plan social, s'est placé dans une « tierce » posture, qui l'a tenu loin des idées marxistes et critique du capitalisme mondial. En ce qui concerne la gouvernance du premier pape global dans un monde brisé, la réforme de la curie, les fusions et les ajustements n'ont que partiellement créé une nouvelle architecture institutionnelle. Et c'est un point qui reste en suspens, car tout comme la société mondiale connaît une transition incertaine, il en va de même pour l'Église : les institutions de demain n'ont pas encore été définies.

François a placé au centre le rapport personnel et ecclésial avec l'Évangile. En suivant cette voie, il a été le leader mondial le plus influent de ces dernières années. Sur la question de la paix en particulier, son message a été exigeant et insistant. La condamnation de la guerre et de ses conséquences tragiques ainsi que l'appel au dialogue ont été centraux, en particulier depuis l'agression russe contre l'Ukraine, le conflit entre Gaza et Israël et les guerres oubliées comme le Yémen, le Soudan, le Soudan du Sud, le Kivu et la République centrafricaine, dans la capitale de laquelle, Bangui, il a voulu ouvrir la porte sainte du Jubilé de la Miséricorde en 2015.

Il s’est fait la voix des victimes des guerres, des derniers, des « laissés pour compte » qui ne sont pas entendus dans nos sociétés. Il a voulu que le chemin de l'Eglise soit « en sortie », jamais enfermé dans les églises. Une Église en dialogue avec tous : les mondes religieux et culturels, mais aussi le vaste univers de ceux qui sont croyants « à leur manière ».

Un grand pape est parti, laissant un vide de leadership, dans une époque confuse et incertaine, à l'ère des guerres qui deviennent éternelles, et dans laquelle la voix de l'Église reste un socle d’humanité.

[traduction de la rédaction]


[ Marco Impagliazzo ]